La retenue temporaire d’argent liquide par la Douane
ANNULATION DES PROCEDURES DOUANIERES IRREGULIERES
Par un arrêt rendu par le 13 janvier 2021, Maître Régina LOPEZ RAMIREZ a obtenu l’annulation pure et simple de l’ensemble des procès-verbaux de la procédure douanière et l’annulation de toute la procédure subséquente à savoir l’annulation de l’ensemble des pièces du dossier.
Dans cette affaire, le mise en examen était poursuivi des chefs de transfert de capitaux sans déclaration, association de malfaiteurs, blanchiment aggravé et blanchiment douanier.
Par l’arrêt rendu par le 13 janvier 2021, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Douai a reconnu que les opérations de contrôle à l’origine de l’ensemble de la procédure et des poursuites exercées contre le mis en examen étaient intervenues en violation de l’article 60 du code des douanes.
Elle a considéré que les douanes avaient fait « une application extensive et erronée des prérogatives inhérentes à l’exercice du droit de visite de l’article 60 du code des douane » et que les agents de l’administration des douanes avaient « effectué un détournement de cette procédure leur permettant ainsi de pallier l’impossibilité de procéder à une retenue douanière, et ce au mépris des droits de la défense et de l’exercice d’un contrôle de l’autorité judiciaire ».
Elle a conclu que « la procédure douanière est dès lors entachée de nullité » et que « la procédure ouverte en flagrant délit à la suite de la remise de X par les agents des douanes aux enquêteurs de la police judiciaire trouve son support nécessaire dans la procédure douanière dont la nullité vicie l’ensemble de l’enquête de flagrance et l’information ouverte postérieurement ».
Elle par conséquent statué comme suit :
« Annule l’ensemble des procès-verbaux de la procédure douanière ;Annule toute la procédure subséquente qui trouve son support dans la procédure douanière ; Dit qu’il sera procédé en conséquence à l’annulation de l’ensemble des pièces du dossier ;
Dit que les pièces annulées seront retirées du dossier et classées au greffe de la chambre de l’instruction »
CA Douai, Chambre de l’instruction, 13 janvier 2021
TRANSFERTS DE L’ETRANGER OU A DESTINATION DE L’ETRANGER DE SOMMES, TITRES OU VALEURS.
On rappellera que depuis la levée du contrôle des changes le 1er janvier 1990 les personnes physiques résidant en France peuvent transférer librement des capitaux à l’étranger et y détenir des avoirs.
Cependant pour lutter contre le blanchiment, le financement du terrorisme et la fraude fiscale, l’Union européenne a mis en place un contrôle sur les transferts d’argent entre les Etats membres de l’Union et entre l’Union européenne et l’étranger pour les transferts portant sur un montant supérieur ou égal à 10 000 euros (ou sa contre-valeur en devise) avec une obligation de déclaration auprès de l’administration des douanes.
UNE OBLIGATION DE DÉCLARATION À L’ENTRÉE ET À LA SORTIE DU TERRITOIRE FRANÇAIS
Les personnes physiques qui transfèrent vers un Etat membre de l’Union européenne ou en provenance d’un Etat membre de l’Union européenne des sommes, titres ou valeurs y compris les valeurs mentionnées à l’article L. 561-13 code monétaire et financier, les moyens de paiement décrits par la loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, ou de l’or, sans l’intermédiaire d’un établissement de crédit, d’un établissement de monnaie électronique, d’un établissement de paiement ou d’un organisme ou service mentionné à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier doivent en faire la déclaration dans des conditions fixées par décret.
Les sommes, titres ou valeurs d’un montant égal ou supérieur à 10 000 euros (ou son équivalent en devises), transportés par une personne physique, doivent être préalablement déclarés à la douane.
Une déclaration doit être établie pour chaque transfert à l’exclusion des transferts dont le montant est inférieur à 10 000 euros (Attention à la monnaie dans les poches !)
Une déclaration est exigée lorsque le transfert est effectué par une personne physique pour elle-même mais également pour le compte d’un tiers.
UNE OBLIGATION DE DÉCLARATION À DESTINATION OU EN PROVENANCE D’UN PAYS TIERS OU D’UN PAYS MEMBRE DE L’UNION EUROPÉENNE
Une déclaration doit être établie à l’entrée ou à la sortie du territoire national que ce soit à destination ou en provenance d’un pays tiers ou d’un pays membre de l’Union européenne.Les déclarations peuvent être faites sur les formulaires de déclaration de capitaux Cerfa N° 13426 ou en ligne sur le site DALIA.
QUE FAUT-IL DECLARER ?
On peut citer de manière non exhaustive :
- les espèces : billets de banque et pièces de monnaie qui sont en circulation comme instrument d’échange
- les instruments négociables au porteur
- les instruments négociables
- les instruments incomplets
- les chèques au porteur
- les chèques endossables
- les chèques de voyage
- les chèques présentant un caractère liquide
- les effets de commerce
- les lettres de crédit
les bons de caisse anonymes….
DES SANCTIONS ENCOURUES EXTRÊMEMENT LOURDES : AMENDE, CONFISCATION
Le manquement à l’obligation déclarative sanctionne le non-respect d’une simple obligation déclarative.
Une déclaration est établie pour chaque transfert à l’exclusion des transferts dont le montant est inférieur à 10 000 euros.
L’obligation de déclaration n’est pas réputée exécutée si les informations fournies sont incorrectes ou incomplètes.
Sont également considérées comme non effectuées les déclarations portant sur des sommes supérieures à 50 000 euros et qui ne sont pas accompagnées des documents dont la production permet de justifier de leur provenance.
Un décret fixe la liste des documents admis pour justifier de la provenance des fonds ainsi transférés. Il fixe également les modalités de transmission dématérialisées de ces documents.
Selon l’article L152-4 du code monétaire et financier :
« I. – La méconnaissance des obligations déclaratives énoncées à l’article L. 152-1 et dans le règlement (CE) n° 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 26 octobre 2005, relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant ou sortant de la Communauté est punie d’une amende égale à 50 % de la somme sur laquelle a porté l’infraction ou la tentative d’infraction.
II. – En cas de constatation de l’infraction mentionnée au I par les agents des douanes, ceux-ci consignent la totalité de la somme sur laquelle a porté l’infraction ou la tentative d’infraction, pendant une durée de six mois, renouvelable sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, dans la limite de douze mois au total.
La somme consignée est saisie et sa confiscation peut être prononcée par la juridiction compétente si, pendant la durée de la consignation, il est établi que l’auteur de l’infraction mentionnée au I est ou a été en possession d’objets laissant présumer qu’il est ou a été l’auteur d’une ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes ou qu’il participe ou a participé à la commission de telles infractions ou s’il y a des raisons plausibles de penser que l’auteur de l’infraction visée au I a commis une infraction ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes ou qu’il a participé à la commission de telles infractions ».
La décision de non-lieu ou de relaxe emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures de consignation et saisie ordonnées. Il en est de même en cas d’extinction de l’action pour l’application des sanctions fiscales. Les agents des douanes procèdent à la retenue, pour les besoins de l’enquête, des documents se rapportant aux sommes consignées ou en prennent copie.
III. – La recherche, la constatation et la poursuite des infractions mentionnées au I sont effectuées dans les conditions fixées par le code des douanes.
Dans le cas où l’amende prévue au I est infligée, la majoration de 40 % mentionnée au premier alinéa de l’article 1758 du code général des impôts n’est pas appliquée ».
Les déclarations portant sur des sommes supérieures à 10.000 euros doivent être correctes et complètes.
Les déclarations portant sur des sommes supérieures à 50 000 euros doivent être accompagnées des documents justificatifs.Les sanctions du manquement à l’obligation déclarative sont extrêmement lourdes.
Une amende douanière égale à 50 % de la somme sur laquelle a porté l’infraction ou la tentative d’infraction ;
La confiscation éventuelle des sommes consignées et saisies, s’il est plausible que la personne ait commis une ou plusieurs infractions douanières (peu important qu’elle ait été définitivement relaxée pour ces infractions) ;
Des poursuites pour blanchiment : le transfert à l’étranger, sans déclaration préalable au service des douanes, d’une somme d’argent d’un montant supérieur à 10 000 euros qui est le produit d’un crime ou d’un délit, peut caractériser le délit de blanchiment.